"Les mots qui vont surgir savent de nous des choses que nous ignorons d'eux." René Char
L'action se déroule en juin 1658. De retour de son périple en province, Molière, jeune comédien plein de fougue et d'ambition, rend visite au grand Pierre Corneille, qu'il trouve en compagnie de son jeune frère Thomas, vif et soupe-au-lait. La rencontre, haute en couleurs, prendra un tour inattendu quand Corneille proposera à Molière un marché insolite.
Il y est, vous l'aurez deviné, question d'une éventuelle collaboration littéraire entre les deux auteurs, mais pas du tout dans le sens où on pourrait l'attendre. Et, bien entendu, la question reste en suspens, le spectateur quittant la salle pétri de ses interrogations, dans la mesure où il ne s'agit aucunement d'un plaidoyer et où le but de l'auteur est de questionner, pas de convaincre ni d'alimenter une quelconque polémique.
Comédie tout public. Durée 80 mn environ.
Distribution : 3 hommes et 1 femme
L'ouvrage est disponible sur Amazon
Une nouvelle version, d'où le rôle d'Angélique a été supprimé, est disponible sur demande.
L'extrait :
" MOLIÈRE – (À Corneille) J’apprécie l’honneur qui m’est fait de goûter du chocolat en votre demeure. (À Thomas) Mais je gage que nous en boirons à nouveau très bientôt. Nous prétendons en effet nous fixer désormais à Paris, où nous ambitionnons d’ouvrir un théâtre permanent.
THOMAS – Sans l’appui d’un Prince, cela semble une entreprise risquée.
MOLIÈRE – Je ne le sais que trop. Mlle Béjart négocie en ce moment même la location du théâtre du Marais, pour lequel le comte de Rhuys nous demande 3 000 livres par an. Je tremble de n’en pouvoir payer les traites.
THOMAS – 3000 livres ? Le vieux grigou ! Je sais de source sûre que le Breton la loue lui-même dans les 2000.
MOLIÈRE – Cela me conforte dans ma résolution de ne faire de ce théâtre qu’une étape. C’est la Cour que je vise.
THOMAS – La Cour ? Pour une troupe de campagne, vous visez haut !
CORNEILLE – Dans tous les cas, il vous faut un appui, vous ne vivrez pas sans cela. De nos jours, les théâtres privés ne peuvent subsister sans le soutien d’un Grand.
(...)
MOLIÈRE – Je vous l’ai dit, je souhaite que ma troupe s’illustre désormais dans la voie que nous a ouverte Andromède. La tragédie.
CORNEILLE – La tragédie ! Vous n’avez que ce mot à la bouche !
MOLIÈRE – Mais, Maître…
CORNEILLE – La tragédie est un genre noble, certes, il élève l’âme, mais je n’en tiens pas moins la comédie en haute estime.
THOMAS – Quelle morale tirer d’une vulgaire comédie ?
CORNEILLE – Mon frère, je ne vous apprendrai pas que c’est par de grands éclats de rire qu’Aristophane tentait de réformer les mœurs de son temps.
THOMAS – Je sais, mon frère, je sais."
Le Tartuffe original en 3 actes, tel qu’il était avant son interdiction par Louis XIV et sa refonte par Molière.
Le Tartuffe ou l’Imposteur, comédie en cinq actes, a été créé à Paris en février 1669. Mais la première version de cette pièce, Le Tartuffe ou l’Hypocrite, a été jouée pour la première fois à Versailles le 12 mai 1664, devant le Roi et toute la Cour, lors des Fêtes de l’Ile Enchantée, données en l’honneur de Mlle de La Vallière, maîtresse de Louis XIV. Il s’agissait d’une farce en trois actes, où Tartuffe incarnait le personnage d’un hypocrite, c’est-à-dire d’un faux-dévot. Mais la Compagnie du Saint-Sacrement a aussitôt fait pression sur le Roi pour que la pièce ne soit pas jouée en public, au motif que Molière y raillait la religion, ce qui tombait on ne peut plus mal au moment où l’Eglise était agitée par la menace de schisme janséniste.
En reprenant le texte et en transformant son hypocrite (faux-dévot) en imposteur (trompeur, calomniateur, escroc, mais sans connotation religieuse), Molière a adouci le trait mais, en même temps, s’est éloigné de la farce. Il nous a légué la comédie grave que nous connaissons. C’est la farce telle qu’elle a été jouée en 1664 devant le Roi que l'auteur s'est proposé de redécouvrir.
Comédie tout public. Distribution : 4 hommes et 5 femmes.
NOTES POUR L’ETABLISSEMENT DE LA VERSION INITIALE DU TARTUFFE
La pièce originale, jouée à Versailles lors des fêtes de l’Ile des Plaisirs Enchantés le 12 mai 1664, était une comédie en 3 actes, qui a été dite inachevée. Mais l’était-elle vraiment ? … Plusieurs documents indiquent que cette première version de Tartuffe était constituée des trois premiers actes de la pièce définitive. Il se serait donc agi d’une version incomplète, tronquée. Certains moliéristes, à l’avis desquels je me range, considèrent au contraire qu’il est faux de dire que cette version jouée en 1664 devant le Roi était incomplète, et ce, pour les motifs suivants :
Quant au fond de l’intrigue, Boileau lui-même souligne le fait que ce premier Tartuffe est d’une toute autre nature que le Misanthrope, et qu’il tient de la farce au moins autant que de la comédie de caractères. Il évoque également un dénouement hautement comique et naturellement abouti, loin du Deus ex Machina que l’on reprochera à Molière quelques années plus tard … Par ailleurs, on sait qu’une batte figurait dans la liste des accessoires…
(Pour lire la suite, merci de vous reporter à l'ouvrage édité)
Une version établie en avril 2017 par les étudiants de La Sorbonne supprime également l'acte II et redistribue les vers de Dorante. J'en suis extrêmement fière !
L'ouvrage est disponible sur ainsi que sur Amazon.
QUELQUES LIENS
Après sa création par LES MOTS EN SCENE... TARTUFFE ET LE ROI a été repris par la Compagnie professionnelle SERIE ILLIMITEE (juin 2014 - décembre 2014).
L'extrait :
"PROLOGUE -
(...) CLEANTE / LE ROI s’assied sur le fauteuil placé côté cour - Molière, mon ami, vous Nous avez fort diverti.
ORGON / MOLIERE s’incline - Votre Majesté… (et s’éloigne à reculons)
MADAME PERNELLE / LA REINE MERE s’approche du Roi - La farce est amusante et les traits habilement portés, mais j’espère, mon fils, que vous ne laisserez pas ce ‘bouffon’ (elle désigne Molière) bafouer plus longtemps notre Sainte mère l’Eglise !
Avec une révérence, ORGON / MOLIERE mime la Reine-Mère et répète d’une voix de fausset - J’espère, mon fils, que vous ne laisserez pas ce ‘bouffon’ bafouer plus longtemps notre Sainte mère l’Eglise.
CLEANTE / LE ROI- Le sujet, vous le savez, est fort à Notre goût.
(Orgon/Molière sort. Furieuse, elle s’éloigne aussi)
(Entre TARTUFFE / HARDOUIN DE PEREFIXE, le confesseur du Roi)
TARTUFFE / PEREFIXE - Sire, cette pantomime est du dernier ridicule.
CLEANTE / LE ROI (hautain) - Nous l’avons fort goûtée.
TARTUFFE / PEREFIXE - Non content d’imposer à Sa Majesté la Reine une maîtresse toute puissante…
CLEANTE / LE ROI (railleur) - … Mais tellement charmante...
TARTUFFE / PEREFIXE - Monsieur !
CLEANTE / LE ROI - Et mère de notre fils Charles.
TARTUFFE / PEREFIXE - Un bâtard !
CLEANTE / LE ROI.
L’exemple vient de haut, mon Père. Rappelez-moi… Combien de Papes, exactement… ?
TARTUFFE / PEREFIXE - Je vous interdis !
ORGON / MOLIERE (aparté) - A chercher les poux sur les autres, ils finissent par vous démanger vous-même.
CLEANTE / LE ROI - Tout doux, Monsieur mon confesseur, ne vous emportez point. Regardez bien, et vous verrez que le personnage le plus ridicule ici n’est point Tartuffe,
TARTUFFE / PEREFIXE - ???
CLEANTE / LE ROI - C’est Orgon.
TARTUFFE / PEREFIXE - Ce pauvre homme ?
CLEANTE / LE ROI - Un benêt.
TARTUFFE / PEREFIXE - Cette victime ?
CLEANTE / LE ROI - Un idiot.
TARTUFFE / PEREFIXE - Sire, je n’admettrai pas que l’on se gausse ainsi de la dévotion.
CLEANTE / LE ROI - Les vrais dévots, Monsieur, nul ne les raille.
ORGON / MOLIERE (aparté) - Qui se sent morveux, qu’il se mouche !
(MADAME PERNELLE / LA REINE MERE s’approche de nouveau)
TARTUFFE / PEREFIXE - Votre Majesté comprendra aisément qu’en cette période troublée…
(Péréfixe voit la Reine et s’incline)… Madame.
MADAME PERNELLE / LA REINE MERE - Monsieur l’Archevêque (elle baise l’anneau)
TARTUFFE / PEREFIXE - Je faisais observer à Sa Majesté qu’en notre époque de trouble, il ne serait point séant que l’autorité morale de l’Eglise parût sapée, fût-ce par une vulgaire comédie.
MADAME PERNELLE / LA REINE MERE - Monsieur votre confesseur a raison, mon fils. Vous vous êtes entiché de cet histrion…
CLEANTE / LE ROI - Ma mère !
MADAME PERNELLE / LA REINE MERE - Parfaitement. Cet histrion. A force de vous flatter, il vous a fait perdre le sens commun.
CLEANTE / LE ROI - Je vous interdis.
MADAME PERNELLE / LA REINE MERE - Vous ne m’interdisez rien. Vous m’avez certes évincée du Conseil mais vous ne me coudrez point les lèvres. Vous ne m’empêcherez pas de dire que je trouve du dernier ridicule que vous ayez accepté d’être le parrain du fils de ce… bateleur ! (un peu radoucie) même si ses farces sont, je le reconnais, fort divertissantes.
TARTUFFE / PEREFIXE (‘tartuffe’ et doucereux) - Mon fils, je ne vous demande qu’un peu de patience. Faites en sorte que le public ne voie point cette comédie et, dès que la situation de l’Eglise sera assainie, je vous promets…
CLEANTE / LE ROI (tranchant) - Le public sait parfaitement démêler le vrai du faux."